27 février 2010

Le bois, une ressource énergétique essentielle au Maroc

Comme beaucoup d'autres pays, le Maroc fait aujourd'hui face à une situation difficile en matière d'énergie : une dépendance énergétique croissante, un coût de l'énergie grandissant dans un contexte mondial de raréfaction des ressources fossiles, et un épuisement de la ressource bois dans plusieurs régions, conséquence d'une mauvaise gestion de cette ressource pourtant renouvelable.
L'ensemble de ces facteurs ont incité le pays à faire le choix de l'efficacité énegétique, en parallèle d'un développement des énergies renouvelables sur son territoire. Il faut dire que le Maroc présente un grand nombre d'avantages géographiques pour l'implantation de ces énergies. Ainsi, on voit depuis quelques années s'y développer des parcs éoliens (régions de Tanger-Tétouan et d'Essaouira) et plus récemment des centrales photovoltaïques (au Sud du pays, dans la région d'Er Rachidia). L'énergie hydraulique n'est pas en reste puisque le pays compte de nombreux barrages dans les montagnes de l'Atlas.
Le développement des énergies renouvelables sur le territoire, de même que la promotion de l'efficacité énergétique, sont les principales missions du Centre de Développement des Energies Renouvelables (CDER), agence nationale marocaine. Concrètement, plusieurs progammes sont pilotés par le CDER, visant l'accès de tous à l'énergie mais aussi la diffusion des énergies renouvelables à grande échelle.
Le Programme solaire thermique PROMASOL assure par exemple la promotion de chauffe-eau solaires labellisés.


La création des Maisons de l'Energie sur tout le territoire depuis une dizaine d'années a quant à elle permis de satisfaire des objectifs à la fois sociaux, économiques et environnementaux. Le principe est simple : le CDER appuie la création de micro-entreprises énergétiques, gérées par des promoteurs âgés de 20 à 35 ans, à la fois en zone rurale et en zone urbaine. Ces Maisons-Energie ont pour fonction de commercialiser des équipements énergétiques économes, voire renouvelables, et d'assurer un service de proximité de conseil et d'assistance technique auprès des usagers.
Autre aspect de l'action du CDER : contribuer au développement rural en favorisant l'accès à l'énergie rurale décentralisée, grâce à de petits modules photovoltaïques. Il s'agit ici de fournir aux foyers les plus excentrés du réseau électrique général de petits panneaux photovoltaïques produisant du courant pour leurs besoins les plus élémentaires. Le problème rencontré dans certaines provinces, comme celle d'Azilal dans le Moyen-Atlas, est que les familles refusent l'installation de ces modules chez elles, en raison de la très faible puissance de ceux-ci ! Les populations excentrées préfèrent attendre leur raccordement au réseau général, étant entendu que si elles acceptent l'installation de panneaux pour leur foyer, elles ne seront plus considérées comme prioritaires pour un tel raccordement.


Concernant l'utilisation de la ressource bois, une ressource énergétique clé au Maroc, notamment en milieu rural, le CDER a lancé un programme baptisé "Bois-Energie". Ce programme vise à promouvoir l'efficacité énergétique dans deux secteurs particuliers : les hammams et les fours-boulangerie. La tradition du hammam est encore très présente dans le pays, et cette pratique est extrêmement consommatrice en bois. Le CDER a donc mis en oeuvre un partenariat avec les fédérations de propriétaires de hammams dans les villes, et avec des associations de développement en milieu rural, afin de diffuser des équipements améliorés, c'est à dire plus économes en bois.
Mais la cause de l'efficacité énergétique en milieu rural progresse surtout grâce au travail d'associations de développement local, parfois soutenues par la coopération internationale. Dans la région de Chefchaouen, nous avons pu rencontrer l'ATED, association Talassemtanne pour l'environnement et le développement.
Cette structure travaille, dans le périmètre du parc naturel Talassemtanne, sur la gestion durable de la ressource bois et sur la sensibilisation au problème de la déforestation en zone rurale.


Elle a ainsi appuyé la construction de fours collectifs améliorés dans certains villages du parc. Toujours autour de Chaouen, le GERES (Groupe Energies Renouvelables, Environnement et Solidarités), ONG française, travaille sur la conception et la diffusion de chaudières améliorées pour les hammams et d'équipements ménagers efficients. Plus au Sud, dans la vallée du Zat, l'Association des Amis du Zat (AAZ) oeuvre également pour le développement de sa vallée et pour la préservation de son environnement. Créée en 1996, l'association met en place des actions dans le domaine du développement rural, de l'écotourisme (trois gîtes ruraux ont été créés) et de la lutte contre la déforestation. En 2004, l'AAZ a encouragé la création de trois fours multifamiliaux pour les potiers du douar de Talatast, à 30 minutes de marche du village de Tighdouine. Ces fours améliorés, recouverts d'une voûte percée de plusieurs trous, remplacent désormais les anciens fours à ciel ouvert.


Ils permettent une meilleure combustion, avec moins de chocs thermiques, limitant ainsi la casse et les pertes pour les potiers. D'autre part, le foyer est plus grand et permet de cuire deux fois plus de poteries en même temps, avec deux fois moins de bois qu'auparavant. Enfin, ces fours peuvent fonctionner avec de la sciure de bois provenant des menuiseries alentours, ce qui réduit la pression sur le bois, de plus en plus rare autour du douar.
Par ailleurs, l'AAZ a équipé 24 mosquées de la vallée de chauffe-eau solaires pour les ablutions des fidèles, permettant là encore des économies de bois. Mais ces appareils coûteux réclament un entretien régulier (renouvellement du liquide caloporteur) qui n'est pas toujours assuré... Enfin, Mourad Abdelmajid, animateur de l'association, nous a confié qu'une tentative avait été effectuée pour équiper certaines familles de foyers améliorés pour leur usage domestique. Mais l'utilisation de ceux-ci requiert un changement des habitudes des villageois (couper le bois en petits morceaux par exemple), et ce changement n'a pas eu lieu. Les familles sont revenues à leurs anciens foyers.
On voit donc que les changements sont difficiles à opérer. La notion de préservation de l'environnement n'est pas une priorité quotidienne pour une population qui vit dans des conditions difficiles en milieu rural, même si cette population est la première concernée par les effets néfastes de la déforestation (le bois se raréfie, il faut parcourir de plus en plus de kilomètres pour le récolter...). Un travail de fond, sur le long terme, avec les populations locales est donc nécessaire, en prenant appui sur des structures locales bien implantées afin de maximiser l'impact de cette sensibilisation.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire